La Surprise de Hrodnia (4/4)
****
Kozietulski, se précipitant au galop, arrive au niveau du cosaque menaçant Napoléon et le stoppe avant qu’il n’atteigne l’Empereur ; alors le Cosaque, frustré de n’avoir pu exécuter son projet, a le temps de donner un cruel coup de lance à Kozietulski avant de disparaître à nouveau dans les brumes. Kozietulski est obligé d’arrêter là son combat mais il a réussi, une fois de plus, à se montrer sous les yeux de l’Empereur… Et pour lui, c’est le plus important....
Figure 1: Le maréchal Bessières arrivant sur le champ de bataille suivi de son état-major (Source-composition de Jan Chelminski, Wikimédia Commons)
****
Pendant ce temps, les Dragons de la Garde du major Letort sont entrés en scène suivis de près par les Grenadiers à cheval et les Toscans du 28ème régiment de chasseurs à cheval. Cet apport de cavalerie rééquilibre le combat mais le rend plus violent car, à présent, les Cosaques ne combattent plus pour tenter un coup mais bien plutôt pour leur propre survie. Telle une bête blessée et traquée, ils rendent coup sur coup et font beaucoup de mal à la cavalerie de la Garde. Les Dragons de l’Impératrice perdent quelques officiers et connaissent un flottement ; Bessières, encerclé par la masse toujours compacte des Cosaques, se trouve alors un instant en difficulté... Les Dragons, partis pour se réorganiser, il faut redonner de la vigueur à la charge...
Figure 2: Le major des Dragons de l'Impératrice, Louis-Michel Letort de Lorville, 1773-1815, servant au régiment depuis sa création et véritable père spirituel de l'unité refusant les promotions aux grades supérieurs pour continuer à commander ses ''enfants'' (Source-Wikimédia Commons)
****
Que font Za?uski et les siens ? Arrivés avec les Chasseurs à cheval, l’escadron de Za?uski s’est dirigé sur une aile et c’est là qu’il a croisé les Mamelouks alors en attente. Za?uski, le Polonais, vient alors demander au natif de Saint-Jean d’Acre en Palestine, le capitaine Jean Renno des Mamelouks de combiner une attaque avec leur troupe respective. Le capitaine oriental accepte bien volontiers et les deux unités se lancent dans le combat en doublant les Dragons en train de se réorganiser en passant entre leurs intervalles. Ils peuvent, ainsi, déboucher sur le flanc des Cosaques qui ne s’attendaient pas à cela.
Figure 3: Mamelouk de la Garde Impériale. En 1812, les Mamelouks véritablement orientaux avaient bien diminué en nombre mais ils restaient toujours une cinquantaine des leurs prêts à tout pour leur Empereur (Source-collection Vinkhuijzen, New York Public Library Digital Collection)
****
Pendant ce temps, l’inépuisable comte lituanien, Ludwik Pac s’est aperçu de l’hésitation des Dragons de la Garde et vient prendre leur tête pour les rallier et les ramener au combat par pelotons : ainsi, rameutés, ces hommes d’élite font payer cher aux Cosaques leur audace matinale... D'autant que les lourds Grenadiers à cheval, menés à Bessières, arrivent maintenant à brides abattues pour se jeter dans la mêlée !
Figure 4: Grenadier à cheval de la Garde arrivant au galop dans le combat ! Cette unité n'est jamais intervenu sur une champ de bataille que pour assurer la victoire... Sauf à Waterloo... (Source-collection Vinkhuijzen, New York Public Library Digital Collection)
****
C’est le tournant du combat. À présent, celui-ci tourne à l’avantage des Français sur tous les points de la lutte. C’est ici que se situe un épisode fameux de ce combat. L’aide de camp de Berthier, Lecoulteux qui combattait avec les officiers d’état-major depuis la première charge de Rapp et qui s’était habillé d’un manteau russe pour lutter contre le froid, emporté par son enthousiasme, avait résolu de combattre les Cosaques à leur façon et s’était emparé d’une lance avec laquelle il fit quelques dégâts. Malheureusement pour lui, un Grenadier à cheval, voyant ce cavalier bien trop russe à son goût le charge et lui plante son sabre en travers du corps, laissant le pauvre Lecoulteux affreusement blessé. Heureusement pour lui, la lame n’a traversé aucun organe et la blessure n’est, donc, pas mortelle.
Figure 5: Aide-de-camp du maréchal Berthier (à gauche), l'uniforme probable de l'infortuné Lecoulteux (Source-collection Vinkhuijzen, New York Public Library Digital Collection)
****
Les Cosaques commencent à se disperser et à refluer: la cavalerie de la Garde n’a pourtant pas dit son dernier mot et compte encore tailler quelques croupières aux hommes de Platov... D’autant qu’à présent, le reste des cavaliers de la Garde sous les ordres du flamboyant général Guyot débouche... Profitant de la fraîcheur de ses hommes, Guyot s’attache à repousser les Cosaques aussi loin que possible. Ceux-ci s'effacent alors dans le lointain se dispersant en petits groupes pouréviter les cavaliers français ivres d'une victoire que l'on a crû improbable... De toute manière, l’essentiel est sauf et dès lors, le combat prend fin avec les premiers rayons du soleil matinal dans la froide et pourtant verdoyante campagne russe…
Fin
Raphael Romeo.
Bibliographie
Sources venant des participants directs
-Bonaparte Napoléon, Correspondance militaire de l'Empereur Napoléon Ier, Paris, 1860.
-Caulaincourt Armand-Louis-Augustin, Mémoires du général de Caulaincourt, duc de Vicence, Paris, 1933.
-Gourgaud Gaspar, Napoléon et la Grande Armée en Russie, ou Examen Critique de l’ouvrage de M. Ph. De Ségur par le général Gourgaud, Paris, 1826.
-Rapp Jean, Mémoires du général Rapp, aide-de-camp de Napoléon, Paris, 1823.
-Za?uski Józef, Les Chevau-légers polonais de la Garde 1812-1814, Cracovie, 1855.
-Za?uski Józef, La Pologne et les Polonais défendus par un ancien officier des chevau-légers de la Garde de Napoléon Ier contre les erreurs et les injustices des écrivains français M.M. Thiers, Ségur, Lamartine, Paris, 1856.
Sources des participants indirects
-Boulart Jean-François, Mémoires du général Boulart sur les guerres de la République et de l’Empire, Paris, 1892.
-De Castellane Boniface, Journal de marche du maréchal de Castellane, Paris, 1895.
-Denniée Pierre-Paul, Itinéraire de Napoléon pendant la campagne de 1812, Paris, 1842.
-Fain Agathon-Jean-François, Manuscrit de l’an 1812,
-Goujeon Alexandre, Bulletins officiels de la Grande Armée, campagnes de Russie et de Saxe, Paris, 1821.
-Labaume Eugène, Relation circonstanciée de la campagne de Russie, Paris, 1820, 446 pages.
-Laugier Cesare de, Gli Italiani in Russia, memorie di un ufficiale italiano per servire a la storia della Russia, della Polonia e dell’Italia nel 1812, 1825.
-Lejeune François-Louis, Mémoires du général Louis-François Lejeune, en prison et en guerre à travers l’Europe, 1809-1814, Firmin-Didot et cie, Paris, 1895, 348 pages.
-Löwenstern Baron de, Mémoires du général-major russe Baron de Löwenstern, par M-H. Weil, Albert Fontemoing, Paris, 1903, tome premier, 420 pages.
-Méneval Claude-François de, Mémoires pour servir à l’histoire de Napoléon Ier depuis 1802 jusqu’à 1815, Paris, 1894.
-Ségur Philippe de, Mémoires du général de Ségur, Paris, 1894.
Bibliographie secondaire
-Boutourlin colonel, Histoire militaire de la campagne de Russie en 1812, Saint-Pétersbourg, 1824.
-Brandys Marian, Kozietulski i inni, Varsovie, 1967.
-Chambray de, Histoire de l'expédition de Russie, Paris, 1823
-Chateaubriand François-René de, Vie de Napoléon, 1847.
-Che?mi?ski Jan et A. Malibran, l'Armée du Duché de Varsovie, Paris, 2001.
-Dupont Marcel, Guides de Bonaparte et chasseurs à cheval de la Garde, Paris, 2002, 128 pages.
-Lachouque Henry, The Anatomy of Glory, Providence, 1961.
-Martinien Aristide, Tableau, par corps et par batailles des Officiers tués ou blessés pendant les guerres de l'Empire (1805-1815), Paris, 1899.
-Mullié Charles, Biographie des Célébrités militaires des Armées de Terre et de Mer (1789-1850), Paris, 1852.
-Straszewicz Józef, Les Polonais et les Polonaises de la Révolution du 29 Novembre 1830 ou portraits des personnes qui ont figuré dans la dernière guerre de l'indépendance polonaise, Paris, 1832.
Ajouter un commentaire